On peut concevoir pourquoi certains ont voté pour la droite : une recherche d’efficacité, de rigueur, de liberté économique, de remise en ordre des finances publiques, de restauration de la responsabilité individuelle et du courage, même si l’on peut regretter que ce soit au détriment la justice sociale.
On peut concevoir pourquoi certains ont voté pour le socialisme : une idée de justice, d’égalité, de liberté sociétale, de générosité, de collectif, d’un État juste contrôlant les pulsions égocentriques de chacun, même si l’on peut regretter que ce soit au détriment de l’efficacité.
On peut concevoir pourquoi certains ont voté pour l’extrême droite : une souffrance et une colère qui conduisent à se replier entre soi dans une sorte d’igloo protecteur que le soleil du monde ne ferait pas fondre, même si l’on peut regretter que ce soit au détriment de la fraternité et de l’avenir.
On peut concevoir pourquoi certains ont choisi d’être insoumis : le rêve éternel des jeunes, et de certains qui croient l’être encore, d’un paradis sur terre, le rêve laïcisé de l’Éden de toutes les religions : une humanité parfaite dans un monde heureux et sans contraintes, même si l’on peut regretter que cet utopisme condamne à une confortable et vaine apesanteur.
Et l’on conçoit mieux encore pourquoi tant de leaders flattent leurs troupes en privilégiant l’idéologie sur le pragmatisme, en électrisant les moindres clivages, en diabolisant toute idéologie concurrente. Une très vieille recette des religions, habilement reprise par les politiques… et les médias.
Mais un séisme s’est produit, une offre politique est apparue qui n’oppose pas la justice à l’efficacité, qui ne diabolise pas l’adversaire, qui cherche à entraîner plus qu’à contraindre, qui choisit le pragmatisme face à l’idéologie. Et les français, stupéfaits de découvrir qu’optimisme, courtoisie et modération pouvaient rimer avec politique, ont choisi cette offre.
Le séisme fut de grande ampleur :
Les républicains, dont une bonne partie s’est déshonorée en refusant de choisir au 2ème tour de la présidentielle, ont abandonné au sauvetage de leurs postes tous leurs principes de rigueur et de remise en ordre : au diable les hausses de TVA qui étaient indispensables, au diable la hausse du temps de travail et la baisse considérable du nombre de fonctionnaires qui étaient la base même du redressement, au diable les immenses économies qui ne sont plus que virtuelles, demain on rase gratis : baisse généralisée d’impôts, défiscalisation des heures supplémentaires… On ne sait même plus pourquoi on veut être élu : pour aider le Président ou pour s’y opposer. En fait, dans ce sauve qui peut, une seule solution pour qui veut rester fidèle à la droite : voter contre elle pour qu’elle prenne enfin le temps de réfléchir à une politique pour le pays et cesse de penser à la seule préservation de ses postes.
La charité oblige à oublier le parti socialiste, pulvérisé en une myriade d’étincelles, toutes éblouies de leur inégalable éclat. Un long travail l’attend avant qu’il ne soit à nouveau capable de proposer au pays une perspective crédible et convaincante.
Le Front National s’est discrédité dans l’inconsistance qu’il a montrée lors du débat du 2ème tour, et dans l’éclatement qui a suivi les résultats. Qui est-il aujourd’hui ? L’Euro n’est plus le diable annoncé, le masque socialisant et protecteur se désintègre sous le retour de l’identité et des valeurs traditionnelles de l’extrême droite, les leaders de ce bal masqué sont attaqués par le canal historique. Personne n’imagine en tous les cas qu’il soit en mesure de proposer une offre de gouvernement.
Quant à la Mélenchonnie stupéfaite et offusquée que le peuple n’ait pas plébiscité sa magnifique lettre au père Noël, elle retourne à son agressivité outragée et activiste et rêve toujours que le monde entier souscrive à son utopie. Un rôle d’aiguillon, indispensable et agaçant, qui invite les puissants à plus d’humanité, le rôle éternel du fou du roi. Un rôle dont l’histoire rappelle les catastrophes survenues lorsqu’un un imprévisible accident les mettait au pouvoir.
Certes, il ne faut pas être angélique ni naïf, la troupe des marcheurs connaitra des difficultés et des divisions, l’unanimisme ambiant se fissurera sans doute et l’avenir nous dira jusqu’où ira la réalité de cette nouvelle offre. Mais y-a-t-il une alternative au fait de lui donner sa chance en laissant aux forces traditionnelles l’opportunité de réfléchir sur leur échec, de retrouver un contact avec une réalité oubliée et de construire une offre qui, un jour peut-être, saura convaincre les français.
Alors, dans une joie que l’Europe se surprend à partager, Marchons, Marchons (sur l’air de la Marseillaise)… L’optimisme fait parfois des miracles.
Bel oeil ! tout à fait en accord avec cette analyse.
Merci Gilles de ton regard.