Fillon, quand un scandale peut en cacher un autre

Fin janvier, à moins de trois mois des élections présidentielles, après la clôture des différentes primaires, des révélations indiquent que François Fillon aurait salarié son épouse et ses enfants dans des emplois présumés fictifs entre 1998 et 2014. La justice ou l’histoire établiront si ces faits sont exacts, le droit dira s’ils sont légaux. S’ils sont réels et illégaux, souhaitons que la justice les sanctionne. S’ils sont réels, mais légaux, ils sont moralement inadmissibles. S’ils sont faux….
Mais il est un aspect de l’affaire que les médias n’abordent pas.

L’emploi plus ou moins fictif de collaborateurs familiaux par les parlementaires est connu depuis fort longtemps et une recherche rapide sur internet retrouve de nombreux articles de presse de tous bords qui abordent le problème. Des effectifs, voire des listes de députés utilisant le procédé ont été diffusées. Les liens en bas de cet article permettent d’en citer quelques-uns.
L’affaire aurait donc pu être révélée depuis longtemps, peut-être quand François Fillon devint Premier Ministre il y a 10 ans, sans doute quand il fut candidat à la présidence de l’UMP il y a cinq ans, certainement quand il se déclara candidat à la primaire de la droite et du centre. Et l’argument, brandi par quelques journalistes, selon lequel on n’aurait pas enquêté sur François Fillon avant fin 2016 parce qu’il était « quasi inconnu » laisse un peu… pantois.
Si l’on avait cherché à informer les électeurs de la primaire pour qu’ils fassent un choix éclairé, les révélations auraient été faites avant l’automne, et elles auraient été utiles à la démocratie.
Mais le choix d’une révélation délibérément tardive d’une information aussi grave, connue depuis longtemps, alors qu’une substitution de candidat est pratiquement impossible, est une atteinte inadmissible à la démocratie puisqu’elle prive, sans recours, une part importante de l’électorat d’un candidat et d’un programme correspondant à ses aspirations.
C’est un procédé fort utilisé dans de nombreuses « démocratures », c’est un procédé qu’on n’attendait pas dans une démocratie occidentale.
Faut-il ajouter que le fait de ne pas dénoncer un délit dont on a connaissance durant plusieurs années constitue également un délit, au minimum de complicité ? Peut-on espérer que le parquet ouvre une information sur ce chef ? Peut-on espérer que les médias fassent enfin leur travail sans s’arrêter au sensationnel ou à leurs propres convictions ? Ce serait certes une révolution dans un monde où chacun ne dialogue plus qu’avec ceux qui partagent son avis.
N’y aurait-il pas autant de difficulté à voter pour un élu indélicat que pour des gens qui décident d’en être complices jusqu’à ce que leur intérêt leur commande de changer d’attitude? La malhonnêteté manœuvrière n’est-elle pas aussi grave que la malhonnêteté tout court?

http://www.politique.net/2014090302-epouses-fils-filles-de-deputes.htm
http://www.politique.net/2012100301-assistants-parlementaires-et-femme-de-depute.htm
http://www.20minutes.fr/politique/1012471-20120928-travail-famille-langues-delient-chez-parlementaires
http://www.lefigaro.fr/politique/2012/09/26/01002-20120926ARTFIG00778-quand-les-deputes-font-travailler-leur-famille.php
http://archive.francesoir.fr/actualite/societe/politique-etats-d-ame-des-attaches-parlementaires-25895.html
http://www.lemonde.fr/politique/article/2012/07/23/deputes-pourquoi-la-transparence-est-un-long-chemin_1736927_823448.html
Et l’on pourra voir dans les articles ci-dessous que les moyens sont multiples et multipartis pour éviter une transparence réelle.
http://www.lemonde.fr/politique/article/2012/07/24/bruno-le-roux-il-faut-plus-de-controle-plus-de-sobriete-plus-de-transparence-au-parlement_1737423_823448.html
http://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/0071/AN/478.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2011-2012-extra/20121013.asp#P783_151742

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